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La Cour administrative se déclare incompétente pour statuer sur des recours portés directement devant elle par des administrations communales en matière de refus d’approbation tutélaire.

La Cour administrative se déclare incompétente pour statuer sur des recours portés directement devant elle par des administrations communales en matière de refus d’approbation tutélaire.

 

Selon l’ancien libellé de l’article 107 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, une commune devait (contrairement à ce que le libellé de la disposition laisse à penser) saisir immédiatement la Cour administrative d’un recours en annulation porté à l’encontre d’un refus d’approbation d’une de ses décisions par l’autorité de tutelle : « il est ouvert aux autorités communales dont la décision à caractère individuel ou réglementaire a fait l’objet d’une annulation ou d’un refus d’approbation par le Grand-Duc ou par le ministre de l’Intérieur un recours en annulation devant «la Cour administrative», pour les causes d’ouverture prévues à l’article 31 de la loi du 8 février 1961 portant organisation du Conseil d’Etat.

Le même recours est ouvert contre le refus d’approbation d’une décision émanant d’une autorité autre que le Grand-Duc ou le ministre de l’Intérieur. ».

 

L’article 100, paragraphe 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, énonçait : « le recours visé à l’article 107 de la loi communale du 13 décembre 1988 est porté devant la Cour administrative ».

 

La saisine de la Cour administrative était obligatoire, le tribunal administratif se déclarant incompétent pour connaitre des recours en annulation introduits par les administrations communales contre des décisions de refus d’approbation d’actes administratif individuels ou réglementaires pris par ces dernières (T.A., 15 mai 2006, n° 20728 et 20777 du rôle  et T.A., 4 mars 2009, n° 24566 du rôle).

 

Bien que la disposition précitée avait pour désavantage de priver les parties au litige d’un « double degré de juridiction », c’est-à-dire de la faculté de relever appel de la décision des juges, elle avait en revanche pour bénéfice le fait d’aboutir à une solution rapide audit litige, puisque les délais de procédure devant la Cour administrative sont plus courts que ceux devant la juridiction de première instance qui est amenée à traiter un nombre d’affaire plus important. Or, si la rapidité de la justice est en toutes matières un enjeu important, elle l’est encore plus en matière de refus d’approbation des actes individuels et réglementaires communaux et ce afin de ne pas bloquer trop longtemps des décisions prises en principe dans l’intérêt général communal.

 

La loi du 6 janvier 2023 a cependant abrogé le paragraphe 2 de l’article 100 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 tandis que l’article 29 de la loi du 6 janvier 2023 a remplacé les dispositions des articles 103 à 107 inclus de la loi communale, en ne prévoyant plus pour les autorités communales de recours directs contre les décisions de refus d’approbation tutélaire.

 

Aussi, dans un arrêt du 8 juin 2023 inscrit sous le n° 48509C du rôle, la Cour administrative en a tiré les conclusions qui s’imposaient en se déclarant incompétente pour connaître du recours en annulation directement portée devant elle :

 

« L’article 29 de la loi du 6 janvier 2023 remplace les dispositions des anciens articles 103 à 107 inclus de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 par des nouvelles dispositions dont aucune ne prévoit  une  quelconque  règle  de  compétence  concernant  un  recours  porté  devant  les juridictions de l’ordre administratif. 

 

Cette démarche dénote la volonté du législateur de faire régner en cette matière dorénavant le droit commun, de sorte à voir porter également en première instance devant le tribunal administratif les recours des communes contre les décisions de refus d’approbation ou d’annulation du Grand-Duc ou du ministre de l’Intérieur. 

 

Cette  volonté  est  corroborée  par  les  dispositions  transitoires  de l’article 58 de la loi du 6 janvier 2023 portant en son paragraphe 3 que « les recours introduits devant la Cour administrative par les autorités communales à l’encontre d’une décision d’annulation ou de refus d’approbation du Grand-Duc ou du ministre de l’Intérieur sont transmis au tribunal administratif sans autres formes de procédure ». 

 

Il résulte de la logique du système mis en place par la loi du 6 janvier 2023 que les dispositions de l’article 58, paragraphe 3, de la loi du 6 janvier 2023 visent les recours introduits devant la Cour avant le 1er février 2023, c’est-à-dire tant qu’elle était compétente pour en connaître. 

 

Le recours sous analyse n’est dès lors pas visé par cette disposition. Les  règles  de  compétence sont d’application immédiate, ce dont l’article 58, paragraphe 3, précité, est également une application. Il ne reste dès lors à la Cour que de constater qu’à partir de l’entrée  en  vigueur  le  1er  février  2023  de  la  loi  du  6  janvier  2023,  elle n’est plus directement compétente pour statuer sur un recours en annulation dirigé par une commune contre une décision de refus d’approbation du ministre, plus particulièrement en matière de refonte de PAG, encore que la décision elle-même a été prise avant l’entrée en vigueur de cette loi. 

 

Dès lors, par rapport au recours introduit le 8 février 2023, la Cour est amenée à se déclarer incompétente pour statuer, en raison précisément de ce que le recours a été déposé après l’entrée en vigueur de la loi du 6 janvier 2023. ».

 

Les plaideurs devront être attentifs à changer leurs habitudes en portant leurs recours en la matière devant la bonne juridiction (le tribunal administratif donc), sous peine de voir ces derniers rejetés pour cause d’ incompétence de la juridiction saisie.

 

Me Sébastien COUVREUR

Avocat à la Cour

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