Droit immobilier

Opposition formelle du Conseil d'Etat au projet de loi portant modification de la loi sur l'aménagement du territoire




Petit rappel des faits :


Les projets de plans directeurs sectoriels, dont la procédure a été officiellement entamée le 27 juin 2014, sont des instuments à caractère contraignant élaborés par le Gouvernement, dans quatre domaines intéressant l'aménagement du territoire, à savoir le logement, les zones d'activités économiques, les transports, et les paysages.

Une enquête publique fut organisée pendant les vacances d'été, permettant aux personnes intéressées de faire valoir leurs observations, les administrations communales disposant quant à elles jusqu'au 28 octobre 2014 pour émettre leurs avis y relatif.

Dès le lancement de la procédure, notre étude a mis en cause des problèmes juridiques qui se posaient et mit notamment en lumière que l'absence de dispositions transitoires dans la loi du 30 juillet 2013 concernant l'aménagement du territoire induirait une situation de blocage au niveau des autorisations de construire.

Cette crainte d'un immobilisme du marché immobilier et des problèmes juridiques inhérents aux projets de plans directeurs sectoriels fut confirmée par une ordonnance du Président du tribunal administratif, datée du 17 septembre 2014, sur base d'un recours intenté par notre cabinet d'avocats.

En réaction à cette décision, le Gouvernement projeta de modifier la loi précitée afin d'y insérer, ex post, des dispositions transitoires afin de pallier avec effet rétroactif, aux problèmes d'applicabilité directe des projets de plans directeurs sectoriels.

Ce sont précisément ces nouveaux amendements qui se voient aujourd'hui durement critiqués par le Conseil d'Etat.

La Haute Corporation voit dans les mécanismes proposés par le Gouvernement une violation des pouvoirs conférés par la Constitution au pouvoir réglementaire, une méconnaissance du droit de propriété ainsi que du principe de l'autonomie locale.

Quant aux dispositions rétroactives suggèrées, le Conseil d'Etat fait remarquer que celles-ci seraient contraires au principe de sécurité juridique et de confiance légitime.

A l'appui de son argumentation, le Conseil d'Etat rappela la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme suivant laquelle le législateur ne peut, par des mesures rétroactives, intervenir afin d'influer sur des procès en cours. Or en l'espèce, il s'agirait bien, entre autre, de cela.

La Haute Corporation émit ainsi plusieurs oppositions formelles et refusa par ailleurs la dispense du second vote constitutionnel. 

Là où le bât blesse, c'est que nonobstant la volonté gouvernementale de procéder rapidement à une modification de la législation en matière d'aménagement du territoire, afin d'éviter de faire perdurer la situation de blocage du secteur immobilier, l'avis du Conseil d'Etat marque un sévère coup d'arrêt au projet de modification de la loi.

Aussi, les effets indésirés et indésirables des projets de plans directeurs sectoriels seraient maintenus tant que la loi ne sera pas modifiée, ce qui, au vu de l'avis précité, ne devrait pas se faire rapidement.

En outre, l'appréciation du Conseil d'Etat a mis en lumière des failles juridiques qui pourraient affecter la régularité (et la Constitutionnalité) des plans sectoriels eux-mêmes.

Dans ce contexte, il s'impose de s'interroger si les projets de plans directeurs sectoriels ne devraient pas être retirés par le Gouvernement.


Pour plus d'informations :

- Notre analyse critique sur les plans directeurs sectoriels.
- L'avis du Conseil d'Etat du 18 novembre 2014.



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